La Skarverennet : une fin de saison en apothéose (par Gilles Perrin)
La Skarverennet est une course norvégienne mythique qui clôture traditionnellement la saison des courses et qui, par une alchimie très spéciale entre le populaire et l’élite réussit un amalgame de toute beauté sur un parcours spécialement tracé pour l’occasion au sommet des fjords.
Tout sort de l’ordinaire dans cette course :
Et déjà ça commence par le point de départ qui se situe au milieu de nulle part et où on arrive en train qui nous dépose sur un haut plateau avec pas plus de 4 maisons.
On est tout de suite dans une atmosphère très haute montagne, d’ailleurs le tracé n’est damé qu’une seule fois par an. La majeure partie des concurrents fait la course en classic et en famille ou entre copains et partent très tôt. Les élites la font en skate, c’est là encore une particularité de cette course ou les 2 styles se côtoient sans se gêner car le damage hyper est large et avec couloirs réservés à chaque style. Les skateurs bien plus rapide partent bien plus tard et donc le jeu est pour les classiqueurs d’arriver au dernier col avant l’élite pour profiter du spectacle.
Une Foule de fondeurs immense
Perso j’avais fait cette année la course en skate et on voyait d’hyper loin la foule massée au sommet de ce col, foule qu’on traversait au milieu d’une haie de spectateurs qui avaient préparé des barbecues ou qui buvaient des bières sous le soleil, cela transcendait de voir autant de spectateurs qui nous encourageaient.
Je n’ai jamais vu autant de monde sur une course populaire, c’était même bien supérieur aux passages de cols du Tour de France… surtout que tout le monde était monté à skis de fond (plus de 12 000 coureurs quand même !), un vrai élan populaire qui explique pourquoi les norvégiens sont si forts en ski nordique.
Une organisation sans faille
Chacun a son horaire de départ pour le train, ou les places sont limitées…. Et respecte l’horaire car les norvégiens sont disciplinés.
Arrivé au terminus du train à Finse chacun descend et se transforme en compétiteur…sur le quai de la gare. Ensuite les sacs vestiaires sont laissés en tas sur le quai de la gare. Ils seront mis dans le train après le départ par les bénévoles et récupérés à l’arrivée, c’est très étonnant et ça fait assez improvisé mais ça fonctionne bien.
2 « Klasses », 2 styles, mais le tout en harmonie parfaite
La TRIM klasse (ou classe populaire forte d’environ 12 000 coureurs) fait à 95% la course en classic, c’est d’ailleurs plus une randonnée qu’une course pour eux et le 1er départ à ski est donné à 8h30 devant la gare de Finse. Après chacun s’échelonne à son rythme. Mais comme c’est la fin de saison on a quand même intérêt à partir tôt pour avoir une trace bien glissante et surtout du fart qui accroche en classic.
La Konkurance Klasse (ou l’Elite de compétition) part à 12h pour les femmes et 12h15 pour les hommes,là ça devient plus compliqué car fin avril la neige détend vite. Surtout que à peine 500m après le départ on a un vrai mur pour atteindre le 1er col, qui en plus est assez long donc là on est vite planté dans ce col qui en plus est vite brassé avec tous les concurrents partis avant.
Au début en skate on se sent un peu seuls car tous les coureurs en classic sont partis bien avant, mais au fil des km on les rejoint progressivement jusqu’à être en symbiose. Mais personne ne se gêne car le couloir pour la Konkurance Klassse bien identifié, idem pour les ravitos séparés.
Pour une piste qui n’est damée que 1 fois / an, le damage est hyper large, c’est hyper pro ! En plus en cours d’épreuve ils redament c’est vraiment bien et agréable vers les 2/3 du parcours d’avoir de nouveau une piste nickel, chapeau !
Le passage au dernier col : l’effort ultime et la fête !
J’ai déjà écrit plus haut que le parcours était à ne pas sous-estimer, surtout les 2 premiers cols qui sont bien casse-pattes. Le 3eme est plus cool ( pas le moins long !) mais c’est le dernier avant la grande descente sur Ustaoset, donc la délivrance. La majorité des Trim Klasse y restent un long moment comme récompense de leurs efforts…
et surtout pour assister au spectacle des fusées de l’équipe nationale qui passent en trombe portés par une haie de spectateurs, c’est la communion totale et si le beau temps est au RDV, c’est la fête majuscule avec musique et bière, ceci alors que nous sommes en haute montagne ! Même les derniers se sentent pousser des ailes .
La fin est toute en descente et ne pose pas de problème ..sauf à éviter les classiqueurs éparpillés et moins à l’aise en descente , mais là encore c’est hyper large et avec un couloir spécifique pour les skateurs, donc risque modéré. On peut savourer avant la dernière épingle et les 100 derniers en faux plat montant.
A Ustaoset, c’est encore plus la foule qu’au dernier col, la sono à fond, et chacun se dirige vers la gare pour le train de retour et récupérer son sac.
Perso , vu le peu de train, j’ai pu rentrer à Geilo en bus car les trains sont peu nombreux et les organisateurs avaient prévus des transports alternatifs pour accélérer les retours = top !
Un tracé court, mais finalement bien difficile :
Quand j’ai vu que la course ne faisait « que » 37 km je me suis dit que ça serait « facile » , mais il n’en est rien pour au moins 3 raisons :
- d’abord l’horaire tardif de départ (12h15) pour la Konkurance Klasse qui avec le faible regel nocturne donne une neige de moins en moins glissante et qui nécessite des appuis plus dosés,
- et surtout un tracé très haute montagne avec passage de 3 cols, dont surtout les 2 premiers qui sont de véritables murs et bien longs. Certes c’est bien d’aborder les difficultés au départ quand on est frais, mais on est vite cramés !
- Ne pas négliger non plus le rôle de la chaleur car là on était en plein printemps, limite ski de rando. D’ailleurs de nombreux concurrents étaient en short et polo à la fin, c’est très étonnant à vivre en pleine montagne.
Au final :
Pour | Contre |
– une fête énorme de fin de saison dans un cadre haute montagne inhabituel et même très exotique avec l’arrivée en train au milieu de nulle part – avec une organisation au top vu la complexité logistique liée à l’éloignement – une symbiose absolue classic / skate et Elite /Populaire – des paysages exceptionnels sur un tracé spécifiquement ouvert ce jour là | – départ un peu trop tardif en skate pour la Konkurance Klasse, avec donc neige un peu brassante – les ravitos qu’avec du Blabar, pas d’aliment solide – les raidars des 2 premiers cols – le très haut niveau de la Konkurance Klassse avec la grande majorité des membres de l’équipe nationale norvégienne – plus de 98% de norvégiens , donc 3 français au milieu c’est bien peu ! |
Conseils pour bien préparer la Skarverennet ?
1/ Déjà réussir à s’inscrire en Octobre et foncer dès l’ouverture des inscriptions car ça part immédiatement tant cette course est populaire en Norvège.
2/ Réserver aussi très à l’avance l’hébergement là-bas pour le WE de course car très peu d’hôtels à Geilo …qui en plus gonflent artificiellement les prix pour la veille de course car l’offre est hyper sous-dimensionnée pour héberger subitement 12 000 skieurs la veille de course. Les hôteliers en profitent ++++.
3/ Pour cette course, un petit sac est obligatoire avec matériel de sécurité indiqué sur le site . Il n’y a pas de contrôle mais on comprend la raison vu que ça se passe en haute montagne.
Pour la Konkurrance Klasse prévoir un tout petit sac car l’objectif est la performance, mais pour la Trim Klasse on a vu les norvégiens avec des sacs de randonneurs et les drapeaux norvégiens en bandoulière, donc à chacun de s’adapter.
4/ Une option est de venir en train le matin en couchant un peu plus loin. Certains partent même d’Oslo ou de Bergen très tôt ( c’est même prévu sur l site d’organisation avec place de train réservée à l’inscription ( sont vraiment très organisés !).
5/ Le retour à Oslo ou Bergen peut se faire facilement après la course en 2h30 environ en train ou un peu plus en voiture.
6/ Tracé de la course
Pour la Konkurance Klasse, le train part Geilo à 10h21 (attention peu de parkings donc venir avant ++).
Après 1h environ, on est déposé à Finse et on a 45 mn pour se préparer. La course fait 37 km entre Finse ET Ustaoset et passe par 3 cols (dont 2 raidards dont il faut se méfier +++++++) et on fini après une épingle à gauche par un faux plat montant de 100 m.
La fin est en descente.
Gilles Perrin, avril 2023